Arrêt du Conseil d’Etat n°397601 du 13 décembre 2017

Présentation des faits 

Une SCA créée en 2002 comptait, parmi ses commanditaires, une société anonyme qui détenait plus de 95 % de son capital et avait pour unique commandité une société de droit américain.

Elle avait opté, avec effet au 1er janvier 2004, pour son entrée dans le groupe fiscal intégré dont la mère était la SA.

À l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale avait remis en cause la validité de cette option, au motif que ladite SA ne disposait pas de 95 % des droits de vote au sein de la société commanditée. Le service avait, dès lors, imposé la SCA sur ses résultats propres au titre de l’exercice clos en 2005.

Le ministre s’était pourvu en cassation contre l’arrêt par lequel la Cour administrative d’appel de Versailles avait rejeté son recours contre le jugement du Tribunal administratif de Montreuil ayant prononcé la décharge des impositions supplémentaires auxquelles la société venant aux droits de la SCA avait été conséquemment assujettie.

Il soutenait que, pour l’appréciation du seuil de détention de 95 % des droits de vote, prévu par les dispositions des articles 223 A et 46 quater-0 ZF du CGI, il convenait, lorsque la société intégrée est une SCA, de prendre en compte à la fois les actions détenues par les commanditaires et, directement ou indirectement, les parts sociales des commandités.

Le Conseil d’Etat a dû répondre à la question de savoir s’il convient de prendre en compte à la fois les actions détenues par les commanditaires et les parts sociales des commandités, lorsque la société intégrée est une SCA, pour l’appréciation du seuil de détention de 95 % des droits de vote, prévu par les dispositions des articles 223 A et 46 quater-0 ZF du CGI.

La haute juridiction administrative a répondu en jugeant que l’administration fiscale ne pouvait légalement exclure la SCA du groupe fiscal intégré dont la SA était la tête au motif que cette dernière aurait disposé de moins de 95 % des droits de vote au sein de la commanditée de la SCA.

Une société en commandite par actions comprend deux types d’associés :

  • d’une part, les commanditaires qui sont les actionnaires de la société et ne sont responsables des dettes qu’à concurrence de leur participation au capital,
  • d’autre part, les commandités qui, nommés par les commanditaires, ont le statut de commerçants, et sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes sur leurs biens propres.

Il doit y avoir au minimum un commandité et trois commanditaires, l’administration de la SCA est assurée par des gérants, qui sont nommés par les commanditaires avec l’accord des et ceux-ci contrôlés par un conseil de surveillance composé de commanditaires.

L’argumentation de l’administration est fondée sur l’article 46 quater 0 ZF disposant au moment des faits :

« Pour l’application des dispositions de l’article 223 A du code général des impôts, la détention de 95 p. 100 au moins du capital d’une société s’entend de la détention en pleine propriété de 95 p. 100 au moins des droits à dividendes et de 95 p. 100 au moins des droits de vote attachés aux titres émis par cette société ».

Cependant, selon l’article L226-1 du Code de commerce seuls les commanditaires sont titulaires de la qualité d’actionnaires au sein d’une SCA. En effet, ce texte prévoit :

« La société en commandite par actions, dont le capital est divisé en actions, est constituée entre un ou plusieurs commandités, qui ont la qualité de commerçant (…) et des commanditaires, qui ont la qualité d’actionnaires (…). »

Dès lors les actions composant exclusivement le capital d’une SCA, sont détenues par les seuls commanditaires.

En outre, seuls les commanditaires actionnaires d’une SCA, à l’exclusion des commandités, participent aux votes des assemblées générales et peuvent être membres du conseil de surveillance.

Il en résulte donc que l’appréciation du seuil requis par l’article 46 quater-0 ZF du CGI ne peut s’effectuer qu’au niveau des commanditaires et non des commandités.